Thierry, 33 ans, a été condamné, le 5 février, par la cour d’assises de Saintes, à 12 ans de réclusion criminelle, assortis de 5 ans de suivi socio-judiciaire pour viols et récidive de violences volontaires sur sa concubine, à Lagord, entre le 31 décembre 2011 et le 5 décembre 2012.
« Je ne l’ai jamais forcée et je lui faisais toujours l’amour avec amour », assure Thierry, dans le box des accusés, le 5 février dernier. « Alors, est-ce normal qu’après un câlin, pour reprendre votre vocabulaire, votre compagne se réfugie à moitié nue sur le toit de la maison et appelle au secours parce qu’elle se fait violer ? », interroge le président de la cour d’assises, Claude Pascot. C’est en effet en ce lieu que la police a retrouvé Anne-Marie, le 5 décembre 2012, autour de 14 h, en état de choc et frigorifiée.
Ce jour-là, à peine rentrée du travail, à 10 h du matin, Anne-Marie subit les assauts de Thierry. Elle est épuisée. Il n’en a cure et l’entraîne violemment dans la chambre où il lui réclame une fellation, avant de la sodomiser. Il en sera de même dans la salle de bains où elle se réfugie ensuite, puis encore dans la chambre. Son calvaire dure plus de trois heures. Ce n’est que lorsque son fils, âgé de 4 ans, entre dans la pièce qu’elle parvient à s’échapper par la fenêtre et à se réfugier sur le toit de la maison pour appeler à l’aide.
L’enquête révélera que ce n’est pas la première fois que Thierry agit ainsi avec sa compagne. Les épisodes de viols et de violences physiques se sont succédé quelques mois après le début de leur relation. Thierry réfute les viols et les violences dont elle l’accuse, quand il ne rejette pas la faute sur elle. Il explique que si Anne-Marie était tendue durant leurs rapports, c’est parce qu’elle était hantée par le souvenir du père de son fils, incarcéré pour viol. Mais, en aucun cas, il n’avait l’intention de lui faire du mal.
Une femme sous emprise Né en Guyane, et arrivé en France à l’adolescence, Thierry a toujours eu des relations difficiles avec les femmes. La plupart l’ont éconduit en raison de sa grande jalousie et de son appétit sexuel démesuré. L’une d’entre elles, plus fragile que les autres, s’est même défenestrée pour lui échapper. L’affaire a été cependant classée sans suite, en raison de l’extrême fragilité psychologique de la jeune femme.
« Les femmes, ça ne vaut rien pour lui », décrète l’avocat général, Christelle Pellet. Avant de le qualifier de « prédateur, qui choisit des proies faciles parce qu’elles sont plus malléables et qu’il est très facile de les faire passer pour des folles ». Anne-Marie avait le profil type : fragile, isolée, instable professionnellement et émotionnellement, et ayant déjà vécu des relations violentes avec d’autres compagnons. Il a fait d’elle son « objet ».
Un « amour criminel » Un objet dont il joue à sa guise, « sachant comment se comporter avec elle pour qu’elle cède, en passant de périodes d’explosion de violences à des périodes de rémission et d’excuses », relève l’avocate d’Anne-Marie, Me Maeva Biteau. Pour elle, l’amour que prétend avoir Thierry pour sa compagne n’est rien d’autre qu’un « amour criminel ». L’expert psychologue parle, lui, d’un « amour égocentrique. Il s’en foutait de savoir si elle était d’accord ou pas. Il fallait qu’il jouisse. C’est tout ce qui comptait pour lui ».
Cet « amour toxique », « jeu sadique » ou « relation sado-maso », selon les qualificatifs des témoins et des experts, a bien failli coûter la vie à Anne-Marie. « Il a assis sa domination en la privant de sommeil et en la déshumanisant, explique l’avocat général. C’est arrivé avec sa précédente victime. C’est encore arrivé avec Anne-Marie. Il les tire par les cheveux, il les traîne par terre, il les humilie sexuellement, il leur introduit des objets de force dans le sexe. Sont-elles consentantes ? Il s’en fiche. C’est lui qui décide de tout. »
Une histoire vouée à l’échec Nul doute pour elle, sa dangerosité est réelle et « supérieure même aux viols incestueux, car le nombre des victimes est réduit statistiquement à la sphère familiale alors que dans son cas, son terrain de jeu, ce sont les femmes fragiles. Or, les femmes fragiles, il y en a partout ». Le risque de récidive étant élevé, elle requiert 13 années de réclusion criminelle, ainsi qu’un suivi socio-judiciaire de 5 ans. « 13 ans de prison pour le risque qu’il peut faire courir sur de potentielles victimes, vous n’êtes pas là pour cela ! », clame l’avocate de la défense, Me Anne Nerrand-Pasquier, en direction des jurés.
Pour elle, l’histoire est bien complexe au sein de ce couple. Nul doute, au départ, il s’agit bien d’une histoire d’amour, mais qui se gâte très vite quand Anne-Marie fait comprendre à Thierry qu’elle n’a pas l’intention de faire sa vie avec lui. À cela s’ajoutent les problèmes d’alcool et l’apathie de Thierry dans sa recherche d’emploi. Le sentiment ne manque pas dans leur histoire, mais « leur relation était vouée à l’échec. Conséquence : ils se sont perdus tous les deux dans cette relation et, des disputes ils sont passés aux violences, même s’il a du mal à le reconnaître », plaide-t-elle. Mais nier ne fait pas pour autant de lui un « pervers, un calculateur ou un prédateur prêt à attaquer toutes les femmes fragiles qui passent devant lui ».
Les jurés n’ont pas été convaincus. Thierry a écopé de 12 ans de prison, assortis d’un suivi socio-judiciaire de 5 ans. Il aura désormais tout le temps de méditer, loin de toute présence féminine, sur la place de l’autre dans une relation, ses violences et sa façon de faire « l’amour avec amour »...
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