Pour la police nationale en Charente-Maritime, de nouveaux outils numériques sont déployés dans les commissariats. Gain de temps, facilitation des démarches, réduction du papier… Illustration à Rochefort.
En matière de numérique, on ne va pas se mentir, la police nationale est un peu à la traîne. Néanmoins, grâce à des investissements conséquents, l’institution est en train de rattraper son retard.
En Charente-Maritime, au premier trimestre 2022, ce sont 50 000 € qui sont programmés pour moderniser les équipements et particulièrement pour développer et déployer de nouveaux outils.
“On est vraiment dans un élan de modernisation et de travail, le plus possible, avec le numérique ”, explique la commissaire divisionnaire Myriam Akkari, directrice départementale de la sécurité publique de Charente-Maritime.
L’un des principaux objectifs de ces nouveautés est la dématérialisation. Entendez par là moins de papier. Ainsi, exit les piles de documents qui s’entassent sur les bureaux ou dans les archives.
“Ça permet d’optimiser
la prise en charge”
Au commissariat de Rochefort, depuis plus d’un an maintenant, le logiciel “Rapid” a été déployé à titre expérimental. Cet outil remplace les registres qui étaient auparavant remplis à la main.
Heure d’arrivée de chaque visiteur, motif de visite, temps d’attente… Tout est inscrit informatiquement, ce qui facilite grandement la tâche de la secrétaire d’accueil : “C’est un très bon outil, très pratique”, concède-t-elle.
De plus, l’ensemble des fonctionnaires du commissariat y ont accès permettant à chacun “de voir en temps réel ce qui se passe”, indique le commissaire de Rochefort, Olivier Saudreau. Les policiers gagnent ainsi en efficience, la communication étant “beaucoup plus fluide” et la remontée d’informations arrivant directement sur le bon bureau.
Autre avantage : “Ça permet au commandement d’optimiser la prise en charge des gens et de sortir des statistiques.” L’année dernière, 4 925 personnes ont ainsi été prises en charge en moins de 15 minutes et 1 005 personnes ont attendu plus de 30 minutes, soit 14 % des visiteurs.
“Il faut savoir que nous sommes un service public qui accueille 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, donc ce flux d’arrivées est très compliqué à maîtriser”, précise le commissaire.
“Remettre du bleu sur le terrain”
Une amélioration qui se retrouve aussi sur l’aspect organisationnel au sein des effectifs de police. Exemple dans la salle de garde du commissariat rochefortais. Un logiciel spécifique permet une gestion intelligente de l’armurerie. Là encore, le papier a disparu et tout est suivi par ordinateur.
Lors de chaque relève, les armes sont ainsi déposées ou retirées par les policiers qui s’enregistrent via leur numéro de matricule et signent sur tablette numérique.
Le logiciel “comptabilise les armes et vérifie le stock, indique le commandant Vion, chef du service de voie publique. C’est un gain de temps important.”
De nouvelles caméras-piétons
Et le préfet du département, Nicolas Basselier, ne peut qu’acquiescer, lui qui rappelle la volonté du président Emmanuel Macron de “remettre du bleu sur le terrain”. L’objectif : moins de temps au bureau et plus de terrain. “L’informatique y contribue de manière déterminante.”
Un travail sur le terrain qui est en partie facilité par le déploiement de caméras-piétons de nouvelle génération, avec une meilleure qualité d’image et une plus grande autonomie de batterie. Elles sont en service depuis le mois de juillet à La Rochelle et les trois autres circonscriptions, dont Rochefort, les utilisent au quotidien depuis novembre.

Leur gestion est “très moderne”, assure le chef du service de voie publique. Elles sont récupérées sur un socle connecté grâce à la carte professionnelle du policier et déposées au retour de la patrouille.
“Quand on revient, on la repose tout simplement et s’il y a eu quelque chose de filmé, ça bascule automatiquement sur l’ordinateur et c’est conservé pendant six mois”, détaille le commandant Vion.
Des images accessibles depuis n’importe quel poste par les officiers et dont l’extraction peut seulement se faire dans un cadre judiciaire.
Le retour est plutôt positif selon le commissaire Saudreau pour qui les caméras permettent d’obtenir “des éléments de preuve” mais aussi d’avoir un effet “très préventif” car “l’enregistrement permet de refaire redescendre la pression.”
Des procédures dématérialisées
Sur le plan des procédures, d’autres outils ont vu le jour à l’image de la pré-plainte en ligne. Celle-ci permet d’effectuer une pré-déclaration pour une atteinte aux biens (vol ou escroquerie) ou certains faits à caractère discriminatoire.
D’ici 2023, c’est la plainte en ligne qui sera développée. Dans les commissariats, cela passe aussi par la procédure pénale numérique avec l’installation de double écran. C’est déjà le cas au sein du bureau des plaintes de Rochefort depuis le mois d’avril.
Le déclarant peut ainsi suivre ses déclarations qui sont “tapuscrites” par le policier en face de lui. “Une tablette numérique remplace la signature manuscrite habituelle”, explique Jean-Emmanuel de Beaumont, adjoint à la sûreté urbaine de Rochefort. Quant au récépissé de la plainte, il est » exclusivement » adressé via mail.
Quel changement pour l’enquêteur et la suite de la procédure ? Un système de bannette numérique a été créé : “La plainte déposée au rez-de-chaussée est transmise à l’étage au responsable de sûreté urbaine qui en prend connaissance et qui l’attribue à un fonctionnaire.”
Pour l’heure, seules les plaintes liées à un crime, “un petit peu plus sensibles”, restent sous format papier ; idem pour les commissions rogatoires.
Depuis le début de l’année, 35 % des plaintes déposées à Rochefort l’ont été de manière numérique et “ça va monter en puissance”, note le commissaire Saudreau.
La part croissante du numérique au cœur de la police nationale est accueillie avec un certain optimisme. “C’est dans l’ère du temps”, concède Emmanuel de Beaumont.
Une numérisation qui prend tout son sens selon le préfet : “Ça améliore de manière prodigieuse les conditions de travail des fonctionnaires.”